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6 février - Agir pour mettre fin aux Mutilations génitales féminines (MGF)

Lors du 5e congrès de la Chaire internationale Mukwege, des spécialistes du Canada et d'ailleurs ont partagé leur expertise et leurs recommandations pour mettre fin à ces pratiques néfastes et mieux accompagner les survivantes.

Le 5e congrès de la Chaire internationale Mukwege s’est déroulé du 3 au 6 décembre, à Montréal, coorganisé par l’USI, l’Observatoire Hygeia et UdeM international. La Chaire Mukwege vise à développer les recherches interdisciplinaires dans le domaine des violences sexuelles basées sur le genre et à fédérer sur cette thématique les connaissances de différents partenaires et universités dans le monde. Durant cette 5e édition, des spécialistes du Canada et d’autres pays ont partagé leur expertise et leurs recommandations pour mettre fin à ces pratiques néfastes et mieux accompagner les victimes.

Contexte et défis

Les Mutilations génitales féminines (MGF) englobent “toutes les procédures impliquant l'ablation partielle ou totale des organes génitaux externes féminins, ou d'autres lésions des organes génitaux féminins pour des raisons non médicales » (Organisation mondiale de la Santé, 2008). Les filles et femmes qui subissent des MGF peuvent faire face à des complications à court et long terme sur leur santé sexuelle et reproductive et leur santé mentale.1 Bien que principalement concentrée dans la plupart des pays d’Afrique et du Moyen-Orient, les MGF sont un problème mondial. Elles sont également pratiquées au Canada, notamment parmi les populations immigrées.2

Les discussions ont abordé la problématique des MGF sous plusieurs angles dont le parcours de reconstruction après une mutilation génitale féminine/excision (MGF/E) dans un contexte de migration. Au Canada comme dans les autres pays d’accueil des immigrant(e)s, il existe des ressources d’accompagnement pour les victimes et des formations spécifiques à ces cas médicaux pour les prestataires de soins et de services de santé. Notons l’importance du travail communautaire et des organismes dans l'accueil des femmes immigrantes. Il est essentiel d’orienter ces femmes vers des ressources et des soins adaptés en tenant compte des autres formes d’oppression qu’elles peuvent subir (sexisme, racisme, etc.) via l’adoption d’une perspective intersectionnelle.

D'autres discussions ont porté sur la situation en Afrique de l’Ouest, où les MGF demeurent une pratique culturelle encore très répandue et un problème de santé publique en raison de ses conséquences négatives sur la santé des femmes. Le changement de comportement face à cette pratique est envisageable en remettant en cause cette coutume patriarcale qui renforce les inégalités de genre.

Plusieurs freins pour l’abandon de cette pratique ont été soulevés tels que l’absence de consensus au niveau de la définition des MGF qui a un impact politique et affecte l’accès aux soins et la manière dont les professionnel(le)s de santé abordent la reconstruction et/ou l’accompagnement des femmes et des filles post-MGF.

Conférence plénière lors du 5e congrès de la Chaire internationale Mukwege. Crédit : 5CCIM.

Plusieurs pistes de solutions ont été identifiées :

-Accentuer les recherches dans le domaine des MGF pour développer les connaissances en matière de MGF. La recherche permet d’élargir notre compréhension sur les éventuelles complications physiques, psychologiques et sexuelles de ces pratiques. Le partage de connaissance contribue à mettre en place des traitements plus adaptés et des stratégies d'intervention plus efficientes pour éliminer ces pratiques à l’échelle mondiale.

- Adopter une approche holistique pour les victimes : les répercussions des MGF sur les filles et les femmes ne sont pas seulement physiques mais elles peuvent aussi toucher leur santé mentale et la qualité de leur vie au quotidien. L’approche holistique, comme celle développée par la Fondation Panzi du Dr Denis Mukwege en République démocratique du Congo, favorise la réhabilitation et l’autonomisation des femmes. Elle intègre un suivi médical continu, un suivi psychologique pour aider les victimes à surmonter les traumas causés par ces interventions, un appui juridique pour les aider à obtenir justice et un appui socio-économique pour assurer leur autonomie. L'autonomisation des femmes constitue un levier important pour mettre fin aux MGF de manière durable. En renforçant leur accès à l'éducation et leur participation active dans la prise de décision, les femmes peuvent mieux défendre leurs droits et influencer les normes sociales au sein de leurs communautés.

- Mettre en place des lois pour interdire ces pratiques : l'adoption de lois contre les MGF constitue un élément essentiel dans la lutte pour leur élimination. Elles encouragent les femmes et les professionnels de santé à signaler les cas de MGF. À titre d’exemple, au Burkina Faso, la situation s’est améliorée grâce à l’adoption d’une telle loi en 1996 (Selon l'UNICEF, en 2010, 76 % des femmes burkinabè avaient subi une MGF contre 67,6 % en 2015).

-Mobiliser les communautés locales : c'est dans cet objectif que l’USI s’engage dans la lutte contre des MGF à travers ces projets d’intervention. L’USI et ses partenaires collaborent étroitement avec les gouvernements, les leaders religieux et les communautés locales. La mobilisation des communautés leur permet d’agir collectivement, en vue d’éliminer cette pratique et de répondre aux besoins des femmes et des filles qui subissent les conséquences de cette pratique, en particulier en matière de santé sexuelle et reproductive et d’égalité des sexes. C’est en ce sens, qu’ils appuient les gouvernements, les systèmes et établissements de santé dans la mise en œuvre de programmes de prise en charge holistique ou de formation des professionnel(le)s de santé pour une prise en charge adéquate et respectueuse des survivantes.

-Développer des coopérations durables : l’élimination des MGF ne pourra se faire qu’avec des efforts coordonnés en impliquant les gouvernements, les communautés, les professionnels de la santé et les organisations de la société civile. La mise en œuvre de stratégies sur le long terme est essentielle et permettra d’atteindre les ODD liés à la santé (ODD 3), à l’égalité des sexes (ODD 5) et aux droits fondamentaux (ODD 16), garantissant ainsi un avenir plus juste et inclusif.

Recommandations issues en partie de la conférence plénière - Se reconstruire suite à une excision en contexte d’immigration de Jasmine Abdulcadir, médecin adjointe agrégée, responsable de l’Unité des Urgences Gynéco-Obstétricales. Consultation mutilations génitales et de la vulve, Hôpitaux Universitaires de Genève, Suisse et du symposium - Enjeux et approches pour des soins de qualité auprès de femmes au Canada vivant avec une mutilation génitale féminine/excision (MGF/E) animé par Bilkis Vissandjee, professeure titulaire à la Faculté des sciences infirmières de l’Université de Montréal.

 

Sources :

1 Organisation mondiale de la Santé (OMS). (2024). Mutilations génitales féminines. Organisation mondiale de la Santé. www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/female-genital-mutilation

2 Gouvernement du Canada. (2022). Mutilation des organes génitaux féminins/excision. Femmes et Égalité des genres Canada. Récupéré de www.canada.ca/fr/femmes-egalite-genres/violence-fondee-sexe/resume-de-recherche/mutilation-organes-genitaux-femme-excision.html