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‘’Ma chère fille’’ : un poème pour lutter contre les mutilations génitales féminines

Pour clôturer la semaine de prévention contre les violences à caractère sexuel de l’Université de Montréal, l’USI partage ce poème rédigé par Halimatou Bah à l'occasion de la Journée Internationale Tolérance Zéro à l'égard des mutilations génitales féminines 2022.

Ma chère fille,

Bien avant ta naissance, quand j’ai découvert les souffrances des femmes en fonction des lieux de naissance, des traditions, des familles je me disais ne pas vouloir de fille pour ne pas augmenter le nombre de victimes.

Des victimes du poids des cultures
Du poids des traditions
Du poids des sociétés
Du jugement perpétuel quand tu es femme
De devoir toujours travailler plus

Ma chère Didi

Sais-tu que bien avant ta naissance les corps de nombreuses femmes ont été mutilés
Sais-tu que la plupart des femmes de ton entourage ont dû subir ce sort
Sais-tu que des millions de femmes et de filles dans le monde vivent actuellement avec les conséquences de ces mutilations
Sais-tu que la société a décidé que les femmes n’avaient pas besoin de plaisir
Sais-tu qu’ils disent qu’une femme pour rester soumise et vierge doit subir cette mutilation
Sais-tu que la religion a été utilisée pour justifier cette bêtise alors que la création Divine est parfaite et que le corps de la femme est parfait.

Tu es parfaite ma chère fille

On m’a dit de faire confiance au temps qui change
On m’a dit que les temps modernes apporteront du changement
On m’a dit que contrairement aux aînées, de nos jours les filles sont chanceuses car on ne coupe qu’un petit bout, un très petit bout, un bout de trop, un bout de ce corps déjà parfait
On m’a dit que ce petit bout qui dépasse était absolument à couper car représente de la poudre à canon qui ferait exploser la soumission des femmes.

Hélas, le temps passe mais les choses demeurent et des petites filles y passent.

Le temps passe et les exciseuses aiguisent davantage leurs lames
Le temps passe et les mutilations se font désormais en pleine nuit
Le temps passe et les cérémonies organisées avant pour célébrer ces atrocités ont fait place à des félicitations par téléphone
Le temps passe et la société continue de fermer les yeux
Le temps passe et les femmes qui veulent protéger leurs filles sont obligées de faire des simulacres d'excision pour dissuader et contenter leurs familles.

Ma fille, ma Didi

Maintenant tu es là

Libre et parfaite tu es née
Libre et parfait est ton corps
Je te promets que de l'excision, tu n’entendras que des récits,
Je te promets que ton nom ne s’ajoutera pas à la liste des millions de filles mutilées
Tel un phare qui éclaire le chemin des marins, je me tiendrai debout et me battrai pour que ta génération et les générations futures ne subissent jamais cette atrocité
Telle une sentinelle je te protégerais et m'assurerais que tu ne vives jamais pareille douleur
Je me tiendrais debout pour que tu te sentes libre de décrocher la lune et les étoiles si l’envie t’en prend
Je me tiendrais debout pour que tu te sentes complète et fière de ton corps
Je me tiendrais debout pour qu’aujourd’hui et à jamais Zéro tolérance à l'égard des MGF/E.

Halimatou Bah, 06 février 2022

À propos de l’auteure:

Originaire de la Guinée, Halimatou Bah est engagée depuis de nombreuses dans la lutte contre les injustices et les violences à l’égard des femmes, particulièrement les violences conjugales et les mutilations génitales féminines/excision (MGF/E). Halimatou détient un Baccalauréat en sciences politiques de l’Université du Québec à Montréal, une maîtrise en administration publique ainsi qu’un certificat en évaluation de programme de l’École nationale d’administration publique.

Halimatou est très active au sein du Réseau d’action pour l’égalité des femmes immigrées et racisées du Québec (RAFIQ) afin de prévenir et sensibiliser les communautés concernées par les MGF/E, ainsi que la société québécoise à se mobiliser et à éliminer cette pratique. Elle est également impliquée dans les activités de l’équipe du projet RHCforFGC (GenderNet), financé par les IRSC et la Commission européenne et dirigé par Bilkis Vissandjée, professeure à la Faculté des sciences infirmières de l’Université de Montréal, chercheure au Centre de recherche en santé publique et collaboratrice de longue date à l’Unité de santé internationale.

Pour en savoir plus sur les défis liés à l’accompagnement aux femmes et aux filles ayant vécu une MGF/E au Québec et au Canada...